Nos vrais ennemis sont souvent nous même. Bossuet
Une journée comme aujourd’hui, quand je sers de hors-d’œuvre à une huée de fourmis en furies. Que le soleil me tape dessus, comme un lamentable bout de verre oublié sur la plage et que je transpire autant qu’un lutteur sumo après 2 heures de combats. Je me dis : « Allez Wesley, il est où l’aéroport qu’on rentre directe à la maison … » Et puis je regarde ce qu’on a fait en à peine deux heures de travail et je me dis : « Ben non, ce n’est pas si grave Chantale ! » Et là, j’oublie rapidement que je vais continuer à me gratter toute la nuit à en devenir paranoïaque. Que demain est un autre jour où mes vêtements vont sentir toujours aussi mauvais après 3 lavages à l’eau chaude. Que mon mascara va continuer à dégouliner encore entre la crème solaire et la transpiration. Et que j’aurais toujours autant de sexe appel dans mes vêtements de fermière qu’un crapaud écrasé sur le chemin (et ici j’ai de la compétition, car il y en a des tonnes sur les routes en état de décomposition !)
Le Wwoofing c’est une expérience incroyable. Mais je pense souvent que les petits êtres sensibles de 5 pieds et 2, comme moi à la peau aussi blanche qu’une tranche de pain sans fibre devraient peut-être s’abstenir. Nous avons eu de la chance d’être tombés sur la ferme que nous avons. Ici les heures ne sont pas comptées. Nos hôtes s’attendent à ce que nous travaillons un peu chaque jour et nous leur rendons bien. Nous ne sommes pas surveillés comme des enfants. Le travail de désherbage n’est pas si difficile (mis à part la chaleur et les millions de fourmis) et il faut dire que Wesley compense souvent pour deux, parfois trois (une vraie machine ce mec !). Certaines fermes n’offrent pas beaucoup de commodités et les Wwoofers sont souvent logés dans des tentes, sans confort comme à l’armée. Certains travaillent plus de 30 heures par semaine. Sérieux, si vous souhaitez vivre ce genre d’expérience à Hawaii, alors faites-le pour une courte période. Au max, engagez-vous pour un 1 mois, le temps de parfaire votre bronzage et votre anglais. Regardez ensuite sur place d’autres fermes, si vous voulez vraiment continuer le supplice. Sur place, il vous sera plus facile de voir les installations et vous saurez à quoi vous attendre. Conseils : Arrangez-vous pour travailler tôt le matin ou après 15h les après-midi, car le soleil tape très fort. Trouvez une ferme proche de la plage ou si possible proche de la ville, pour avoir quelque chose à faire de vos temps libres (ou munissez votre ordi de livres virtuels à la tonne et de sudoku).
Il nous reste à peine une semaine de travail avant le départ de nos hôtes. Ensuite nous serons logés dans un petit studio et nous n’aurons que quelques tâches d’entretien à faire durant la semaine. Nous allons louer une voiture (car sans voiture sur l’île vous êtes morts, c’est moi qui vous le dis !). Et nous allons enfin profiter… Mahalo* !!!
Voici une idée du désherbage hawaïen afin de vous mettre en contexte. Vous l’aurez compris, pas de photo de moi en fermière (j’ai mon orgueil)…
* Mahalo = Merci en Hawaïen
Feux d’action sur notre rue cette semaine ! La vache des voisins s’est sauvée ! Elle en avait certainement marre d’être isolée sur son petit lopin de terre ! Il faut savoir qu’à Hawaii pour économiser des taxes, vous pouvez facilement vous prétendre agriculteur et personne ne vous demandera de compte. Eh oui, il n’y a pas que Mosanto qui peut faire des embrouilles sans se faire embêter ici! Il suffit d’avoir une tête de bétail sur son terrain, comme une vache ou deux-trois chèvres et vous économiserez beaucoup d’argent. Ainsi la voisine, comme plusieurs autres (pour ne pas dire toute la rue), a acheté un ruminant pour se sauver du gouvernement (malins ces Hawaïens). Sauf que cette fois-ci, la vache a décidé de défoncer sa clôture pour aller vagabonder… Ce que font beaucoup de poules et de cochons qui se promènent en liberté dans les rues d’Hilo. Comme le dit souvent notre hôte en soupirant, ici c’est un troisième monde… J’ai bien peur qu’elle ait raison…
On a pas encore retrouvé ladite vache, des rumeurs circulent en disant que cette dernière est partie directement à la boucherie… Suicide ou insouciance de sa part… Une chose est certaine, c’est que cette vache devait vraiment s’emmerder. Parfois, on la croisait avec un oiseau sur son dos (un oiseau qui mange les puces). Certains disent qu’avant notre arrivée, elle s’était faite comme ami, un cochon sauvage et que c’était la vache la plus heureuse du monde (comme la vache qui rit), mais ce dernier a terminé en méchoui par un voisin affamé…
Fait plus intéressant avant que vous pensiez qu’on n’a pas grand-chose à faire sauf de s’intéresser à une vache perdue (ce qui est à moitié vrai). Nous avons trouvé une chute secrète derrière un terrain privé. Le genre de chute qu’on trouve dans les publicités de gel douche. Le genre de chute aussi où il y a de gros, gros panneaux qui interdisent l’accès… Mais on est à Hawaii alors tous le monde fait ce qui lui plaît, pas vrai ! Et si quelqu’un nous demande ce qu’on fait là, alors on leur dira qu’on cherche une vache !
On vous mettra au courant si cette vache revient ! Il faut bien se divertir avec ce qu’on trouve. Nous n’avons pas Internet ici… Merci à ceux qui m’ont envoyé des livres ça va m’occuper un peu l’esprit…. Je crois que la chaleur m’affecte trop. Depuis notre arrivée, Hilo bat des records de température…(Soupir)….
Le centre-ville de Hilo est certainement le meilleur endroit pour rencontrer les locaux. Ça se voit, ici tout le monde ici se connaît, s’envoie la main, se fait une belle petite accolade et s’arrête discuter pendant des heures (story-talk comme ils le disent). Quand tu as comme insigne sur ta plaque d’immatriculation un arc-en-ciel et que l’indice humidité monte à plus de 80%, chaque jour, n’est-ce pas normal de vouloir prendre son temps ? Je vous préviens, ici rien n’est à l’heure. Les ponctuels doivent se mordre la langue ou se résigner à admirer le paysage plus longtemps que prévu, c’est la loi d’Hawaii : Soit cool ou tait toi !
J’avoue que dans ce décor hippie digne des années peace and love, on détonne un peu Wesley et moi. Sac à dos immaculé, baskets de randonneurs au pied et crème solaire plein les poches. Ces indices ne peuvent nous trahir. Et je ne vous parlerais même pas de notre accent pourri (sur lequel on travaille, je vous assure). Même si j’arrive à prendre un peu de couleurs grâce au soleil, et que Wesley laisse pousser sa barbe, je sens biens dans leur regard qu’on fait partit du clan des méchants blancs qui viennent leur arracher un peu de leurs paradis.
Si certains vous le font sentir (dans le Helo Bus en particulier), il n’en demeure que beaucoup on la gentillesse gravée au coeur et qu’un sourire peu facilement nous faire oublier certains regards provocateurs. Je pense à cette vieille dame japonaise* croisée dans une rue samedi. Elle nous a fait l’un de ses plus beaux sourires, digne d’une publicité de dentifrice. Sans raison, juste par gentillesse…on a fondu en deux secondes, comme du beurre au soleil.
Les Hawaïens me font penser un peu aux Corses. Ils semblent éprouver des sentiments d’amour et de haine envers les touristes. Si beaucoup d’Hawaiiens font de nos désirs touristiques leur gagne-pain, plusieurs ont du mal à nous tolérer. Plausiblement, les moins bien nantis. Ceux qui n’ont malheureusement pas droit à leur part du gâteau et ne survivent qu’avec des miettes. Devrions-nous les blâmer ?
Dans le but de s’enrichir, certain ont sensiblement « Disneylanisé » les plus beaux coins de la région. On n’a qu’à penser à Kona, la partie ouest de l’île, qui possède les plus belles plages de sable blanc. On n’y voit que des vacanciers bedonnants, rouges comme des homards et des amas d’hôtels de luxe. Une overdose d’artificielle qui détruit assurément le paysage et croque sur les terres ancestrales. Une situation que les gens de Hilo cherchent apparemment à échapper.
D’ailleurs en ce moment, plusieurs Hawaïens bloquent l’ascension du Mont Mauna Kea en protestation contre l’installation d’un nouveau télescope. Un 18e de plus qui prendra place sur cet ancien volcan sacré par le peuple. Facile de prédire qui va gagner… C’est le combat du patrimoine contre la science…Contre de gros $ US.
Le tourisme est devenu la première industrie mondiale et emploie plus de 200 millions de travailleurs à travers le monde. C’est un secteur industriel incontournable et un levier économique stratégique pour plusieurs pays, surtout pour Hawaï. Toutefois les enjeux sociaux et environnementaux liés à cette exploitation peut-être facilement néfastes. Hawaï vise à devenir une destination touristique durable en 2025, peut-être pour Honolulu, mais j’ai l’impression que le Big Island, le message est passé plus loin… Ça reste à voir….Peut-être suis-je trop pessimiste.
En terminant, rassurez-vous, les Hawaïens sont très gentils et aucun ne va vous embêter ni vous faire du mal ! On est quand même aux États-Unis. Toutefois, on vous fera bien sentir à certains endroits que vous n’êtes pas tout à fait le bienvenu (absence de politesse, de sourire, etc.). Pour l’esprit d’une Québécoise, c’est parfois difficile)… Dans ces moments-là, je pense au sourire de notre petite dame japonaise et ça passe ...
*Vous allez croiser sur la Big Island énormément de personnes à la physionomie japonaise. La raison est simple, en 1850, la population a eu besoin de main d’œuvre supplémentaire pour subvenir au besoin de la culture de la canne à sucre qui montait en flèche. Ainsi des Chinois, des Portugais, des Philippins et beaucoup de Japonais en quête de travail sont venus prêter main-forte. L’immigration a permis le fort multiculturalisme qu’on retrouve aujourd’hui sur l’Île.
Les petites bibittes ne mangent pas les grosses ! OK c’est sensiblement vrai. Mais à Hawaii, particulièrement dans le secteur ou nous habitons, il y a certaines bestioles dont on aimerait se passer. D’ailleurs, moi et Wesley pensons que même avec tout l’argent du monde, nous n’arriverions probablement pas à vivre ici en raison de ces petites créatures. La beauté du paysage hawaïen à un prix !
Si petits soient-ils, ces insectes peuvent rapidement vous rendre fous !
Les fire ant… Ce sont de minuscules fourmis d’environs 2mm, elles sont partout ! Dans ton bain, sur le plancher, dans ton pyjama, dans ton verre d’eau, sur la cuvette des toilettes (oui, oui on s’est fait mordre les fesses!). Quand elles se choquent, elles piquent sans remords et il se forme une plaque rouge sur la peau pour quelques heures. On ressent une sensation de brûlure entre 5 et 10 minutes… Je les maudis !!! À mon actif, j’ai déjà une trentaine de leurs piqûres et je ne m’y fais toujours pas. D’ailleurs, je paranoïe quand je dors, je les imagine partout et je me gratte sans arrêt. Chaque fois que je mets un morceau de vêtement, je vérifie qu’il n’y en a pas une de cachée. Oui Patrick, je t’écoute, je vérifie maintenant toujours mes chaussures deux fois avant de les mettre :)
Les coquerelles géantes et solitaires (nous les avons nommés de cette façon). Contrairement aux fourmis, elles ne se présentent pas en groupe et elles sortent la nuit. On en capture habituellement une le soir dans la cuisine avant d’aller dormir et on la relâche le lendemain dans le jardin à grand coup de bâton… ( rien ne peut prétendre que c’est toujours la même qui revient, mais on aimerait bien que cette histoire d’amour à sens unique s’arrête).
Les lézards, ce sont de super collaborateurs ! Ils sont partout dans la maison et bouffent les moustiques dans les fenêtres. Ici, c’est comme un buffet à ciel ouvert pour eux ! Malheureusement, il manque de lézards pour suffire à notre demande d’extermination de maringouins…
On vous laisse avec ce récital d’une grenouille Coqui. De petits amphibiens spécifiques à l’île. Elles sont petites, mais elles font un bruit très fort ! La nuit elles se mettent à chanter en cœur, c’est très spécial. D’ailleurs, on compte en faire une bande sonore de quelques minutes qu’on pourra écouter quand on aura le mal du pays à notre retour.
Fait intéressant, il paraît que les îles hawaïennes n’avaient pas tout ce charabia d’insectes, il y a quelques années. Il semble que les importations de denrées étrangères et la multiplication des voyageurs en soient la cause. D’ailleurs avant d’atterrir en avion, on vous fera remplir un questionnaire sur votre provenance, ce que vous rapportez, vos dernières visites dans une ferme, etc. Le gouvernement se penche de plus en plus sur cette nouvelle forme de contamination et avec raison. Ici, avec le climat tropical, n’importe quoi pousse rapidement et facilement, y compris les parasites et les insectes. Dans ce sens, un méchant virus vient noircir un peu le tableau de notre voyage. Le Rat lung worm. (cœur sensible s’abstenir de lire les dernières lignes). C’est un verre qui se multiplie dans votre corps, monte au cerveau et peut donner la méningite. Quelques cas ont été répertoriés sur les îles, mais particulièrement celle de Hilo, où nous sommes, depuis 2008. Afin de prévenir, nous devons méticuleusement tout laver au vinaigre et bien cuire nos aliments, car le parasite se situe sur la peau des végétaux… Un peu dommage quand tu visites l’île et que tu as une fringale de fruits frais.
Le marché de Hilo a lieu deux fois par semaine (mercredi et samedi) Andrea a eu la gentillesse de nous y amener ce matin. La maison où nous habitons est assez loin du centre-ville (dans la jungle, comme nous aimons dire). Alors quand on l’occasion de sortir, on en profite ! Il faut dire que Hilo n’est pas une grande ville, on y a vite fait le tour. L’agglomération garde encore des airs authentiques, car les touristes ne s’y aventurent pas trop. Contrairement à la ville de Kona à l’autre bout de l’île avec ses grands hôtels, ses plages de sable blanc et ses restaurants, Hilo a moins à offrir, mais les gens sont tranquilles. Après 20h, tout le monde est couché… C’est un peu Ottawa face à Toronto … Faut choisir son équipe, J les habitants ne semblent pas apprécier la ville de Kona, qu’il nomme affectueusement Konalifornia en hommage à ses bars et ses partys.
Une fois dans la voiture :
Andréa : faites des réserves, on attend un ouragan vendredi, il se peut très bien que le marché soit fermé samedi…
Chantale : He…
Wesley : He…
2 Franco-Québecois en panique : Un ouragan ?
Andrea : C’est assez fréquent sur l’île, mais ne vous en faites-pas vous êtes dans une grande maison …
Il semble que ça va frapper fort, mais qu’on est en sécurité dans notre petit palais de 7 chambres, ce sont les maisons en bois proche de la mer qui risquent plus d’y passer. Ici, personne n’a l’air de paniquer, c’est plutôt bon signe. (Zahia et Gisèle, ne vous en faites-pas, on sera prudent, pour les autres ont aura des photos…ou pas …. ).
Aperçus du marché de Hilo :